De retour au bercail...

( suite du topic La paye hebdomadaire... )


Environ une demie-heure plus tard, la petite famille Andrews-Asherton regagnait le Straiway to Heaven. Étrange chose, l'endroit n'était pas très actif, si l'on pouvait s'exprimer de la sorte . . .

Le Stairway to Heaven représentait quelque chose d'important pour Edward. C'était à cet endroit précis - en montant les marches du bordel quatre ans auparavant - que le jeune homme avait retrouvé Elizabeth Andrews après plusieurs années d'absence.

(Vous croyiez peut-être que j'allais écrire d'autre chose, sales pervers ?!)

Les deux amis d'enfance s'étaient alors assis dans un coin pour parler des vieux temps. Après quelques semaines, tout ceci termina évidemment de manière affectueuse, à l'insu bien sûr du cher mari d'Ellie . . . Par contre, lorsque celui-ci découvrit leurs secrets (la relation amoureuse entre les deux amants et aussi le travaille dans lequel ils excellaient le plus souvent - mis à part le bordel dans le cas d'Ellie), Lord Andrews fut considéré par les deux tourteraux comme un homme qui en savait trop.

Edward était en train de se remémorer les événements lorsque des images du moment exact où il égorgeait le vieil homme lui revinrent en mémoire.

Le tueur à gages sursauta en poussant une légère exclamation de surprise, attirant l'attention d'Ellie et d'Abygaëlle.

" Qu'est-ce qu'il y a papa, fit la petite fille. Tu rêves encore debout? "

Elizabeth se mit à rire mais Edward regarda sa fille d'un regard incrédule. Comment pouvait-elle le savoir ? Un enfant voit bien des choses et les interprète à sa manière. On disait aussi que la vérité sort toujours de leur bouche.

" Papa! Tu es encore dans la lune . . ., retentit la voix d'Abby. "

C'était fou comme Edward pouvait partir à la dérive, à chaque seconde.

Le jeune homme força un sourire avant de continuer son ascension dans les escaliers. Prenant un peu de retard à l'arrière, Edward regarda deux des quatre filles dont il tenait le plus au monde et se rendit compte, une fois de plus, à quel point elles étaient magnifiques. Les deux têtes rousses se tournèrent vers lui et le regardèrent perdre presque pied. Edward se redressa, embarassé, puis pressa le pas pour les rejoindre.

Puis il vit sur le visage de sa chère Elizabeth une expression qui lui était curieusement familière. Seule une femme qui veut quelque chose de précis peut avoir un tel regard . . .

* Aïe, ça y est, elle va me remettre ça !, pensa le tueur à gages, transpirant sous les yeux verts de son amante. *

(Yes I know my little Eddy, I'm horribly late, but I know that you will forgiven me because you're the best man I could never ever had... )

C'est silencieusement que la famille d'Elizabeth traversa les quelques rues qui séparaient le Stairway to Heaven du magnifique manoir d'un des deux aristocrates les plus connus de la capitale de l'Angleterre, Adrian Lynley. En tenant fermement la petite main potelée de sa fille, Ellie monta les escaliers étroits de son établissement vieux de cinq ans, sachant qu’Edward les suivait en arrière. Elizabeth se remémora pour une millième fois la création de son bordel. Ce simple petit commerce avait une place bien particulière dans le cœur de la jeune mère, c’était à cet endroit qu’elle avait revu, après presque dix ans, Edward et Adrian.

Plongée dans ses pensés, elle ne vit pas sa fille se retourner vers son père, c’est seulement quand elle entendit sa petite voix fluette qu’elle sortit de ses rêveries. Apercevant le visage de son amant, elle devina que lui aussi, quelques instants plutôt, avait été plongé dans ses souvenirs, Elizabeth le connaissait trop bien pour ne pas savoir ce à quoi il songeais. Elle rit tout en ce remémorant le cou sanglant de feu son mari, Lord Andrews.

Se retournant, les deux filles continuèrent de monter les marches tranquillement. Pourquoi, chaque fois qu’Elizabeth repensait au passé, une bouffé de nostalgie lui montait à la gorge, s’entravant dans sa trachée et finissant son chemin jusque dans ses yeux. Ne voulant pas laisser ça peine transparaître aux yeux sensibles de sa fille, Ellie essuya du dos de sa main, d’un geste brusque, les quelques larmes qui s’était pendus à ses longs cils roux.

En entendant un bruit sec la jeune femme et sa fille relevèrent la tête pour apercevoir l’amant et le père perdre l’équilibre et se rattraper de justesse grâce à la magnifique rampe en ében. Revenant à la réalité Elizabeth repensa à la lettre de sa sœur Adelaide qui l’attendait sur son lit. Fixant son regard sur Edward, elle lui fit comprendre par la pensée qu’il n’avait pas fini de l’entendre et, qu’il le veuille ou non, dans quelques heures il viendrait avec elle et Abygaëlle chez sa sœur. Calment, elle ouvrit la porte du petit salon du Stairway to Heaven. Effectivement, elle devait passer par là pour prendre des nouvelles d’Aileen. Elle l’avait vue partir le matin même avec un homme à l’allure louche.

Silencieusement, le tueur à gages suivit la femme de sa vie à l’intérieur de l’établissement où ils débouchèrent tous les trois dans un petit salon sombre. Ses yeux se mirent à fureter l’endroit rapidement, sans qu’il sache vraiment ce qu’il cherchait du regard. C’était une habitude qu’il avait adoptée depuis la naissance d’Abygaëlle. Tout comme Elizabeth, il était accoutumé de ce bordel et comme il y avait tellement passé de temps pendant ces dernières années, Edward en avait vu de toutes les couleurs. Des ivrognes, des riches qui ne savaient plus quoi faire de leur fortune, des salauds . . . Bref, des hommes de qui il est préférable de se méfier, surtout lorsque l’on était accompagné de sa fillette de trois ans. Edward se rappela un temps où Abygaëlle n’avait que deux ans et de cet ivrogne qui s’en était trop approché à l’endroit même où le tueur à gages se tenait présentement. Le jeune homme, en père protecteur, avait laissé passer sa douce avec leur fille adorée puis s’était tourné vers l’individu louche en lui lançant un regard enragé, les poings si serrés que ses jointures en souffraient déjà un peu. Et devant tous les curieux à l’intérieur du salon, le fils de feu Lord Asherton avait sauvagement battu le malheureux qui l’avait mis en rogne. L’homme en question, bientôt sobre, sortit en titubant, avec quelques dents en moins, quelques côtes cassées et le nez méconnaissable et sanglant. Après cet incident, Elizabeth, furieuse d’avoir perdu un client, fut surprise de savoir que, deux semaines plus tard, l’homme qu’Edward avait vaincu à mains nues avait été la cible même du tueur à gages personnel de son associé, Lord Lynley.

Edward Asherton se passa la main dans ses cheveux bruns avant de se tourner vers la veuve Andrews, s’étant avancée vers l’une de ses plus jeunes employées. À dix-sept ans, Aileen en faisait au moins vingt, comme eux. Pauvre petite Irlandaise . . . Sa mère lui avait été arrachée par les griffes de l’ange de la mort il y avait bien longtemps. Et son père . . . Ivrogne lui aussi. Edward soupira. Il se considérait encore chanceux pour ce qui lui restait ; une mère, une jeune sœur et une petite famille bien à lui. Pour Aileen il n’y avait plus rien. Sauf peut-être le salaire appréciable d’Elizabeth et son caractère qui lui venait beaucoup en aide. Malheureusement pour elle, depuis ces derniers temps, il avait semblé à Edward qu’elle tombait souvent sur les plus durs.

Il s’approcha des deux femmes qui discutaient entre elles. Abygaëlle, accrochée au jupon de sa mère bien-aimée, regardait l’adolescente aux cheveux rouges avec de grands yeux. Détournant son regard pétillant vers son père qui avait surgit à leurs côtés, elle lui tendit une petite main. Edward se sentit drôlement soulagé, tout en prenant les doigts minuscules entre les siens. Après quelques instants à fixer Elizabeth, le jeune Asherton se tourna vers Aileen, ayant l’air exaspéré, et, la gratifiant d’un joli sourire, la salua poliment.

(suite au petit salon)